Atelier de réflexion n°3 - 24 avril 2007

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 Atelier 3

mardi 24 avril 2007 de 18h30 à 22h

Démocratie participative et développement durable

 Si le développement durable exige la participation, la participation peut-elle être circonscrite d’entrée de cause dans une perspective de développement durable ?
 Le développement durable n’est-il pas un projet politique qui, par essence, ne recueille pas l’unanimité et qui, dès lors, s’il est présenté comme le cadre dans lequel doit se développer la participation, va rejeter sur les marges de celle-ci les opposants à ce projet ?
 Dans un tel cas de figure, la démocratie participative n’est plus démocratique puisqu’elle exclut d’entrée de cause ceux qui ne sont pas d’accord avec son objet... N’est-ce pas ainsi qu’est ressenti actuellement le Forum de Saint-Jean par une partie de la population qui ne se retrouve pas dans les idées de modération de trafic par exemple et qui décide de boycotter les réunions ?

 Atelier introduit par :

 Manuel Tornare, conseiller administratif de la Ville de Genève
 Gaëlle Haeny, chargée de projets à equiterre
 Dominique Joye, professeur à l’UNIL - faculté des sciences sociales et politiques
  Sami Kanaan, Directeur adjoint au Département des affaires sociales, des écoles et de l’environnement de la Ville de Genève
 Alberto Perez Iriarte - Département de l’économie et de la santé / Service cantonal du développement durable


NB : voir également quelques liens sur les Ateliers de l’Avenir organisés par ECO 21 pour l’élaboration des Agendas 21 communaux en bas de page.


18h30 - accueil

 

19h - points de vue & introductions
Manuel Tornare, Gaëlle Haeny, Dominique Joye, Sami Kanaan, Alberto Perez Iriarte,
Gestion du débat : Pierre Varcher (Maison de Quartier de St-Jean)

 

19h30 - travail en groupe

 

19h50 - questions/réponses
Questions des groupes aux intervenants

 

20h30 - pause / bar & buffet

 

21h - débat en plénière
Animation : Alain Simonin, formateur à l’Institut d’Etude Sociale,
Laurent Duruz, consultant au Point & Pierre Varcher, Maison de Quartier St-Jean

 

22h - fin


Problématique

Ce troisième atelier fait partie d’un tout qui a commencé par une première soirée qui a permis de nous interroger sur les relations entre démocratie participative et démocratie représentative, y compris tout le secteur relevant du pouvoir exécutif, c’est-à-dire l’administration. En fait, ce sont les préoccupations autour de la gouvernance qui ont été au cœur de cette première réunion et que l’on va certainement retrouver ce soir. Il a été relevé qu’il n’y a pas lieu d’opposer la démocratie participative à la démocratie représentative, mais bien plutôt de dégager les interactions entre ces deux modes de participation à la décision, entre ce qui a été défini comme, d’une part, l’expertise du quotidien et, de l’autre, les experts de la procédure...

Puis lors d’un deuxième atelier, la réflexion a porté sur les conflits comme sources de blocages de la démocratie participative et les outils nécessaires pour passer d’une logique de la confrontation des représentations et des intérêts individuels à une logique de la coopération dans la recherche de prises de position faisant sens collectivement. A partir du moment où l’intérêt général n’est pas conçu comme un donné prédéfini mais bien comme une construction sociale, le conflit, part intégrante d’une diversité culturelle réellement vécue, devient une étape indispensable qu’il ne s’agit pas d’éluder, mais bien de surmonter. Encore faut-il en avoir les moyens...

A la fin de ce deuxième, un échange entre deux participants a, de fait, ouvert le champ de questionnement de la troisième rencontre :

L’un d’entre eux a relevé que les gens investis dans des démarches de démocratie participative devaient prendre garde à ne pas se faire instrumentaliser par le pouvoir politique et/ou l’administration qui sont enclins à faire porter aux habitants la responsabilité de décisions qui ne peuvent pas être prises à leur niveau. L’exemple de la rue du Beulet (ou de tout aménagement d’une rue) est emblématique de ce point de vue : un aménagement (par exemple en rue résidentielle ou en zone 30) répond toujours à l’application locale d’une politique globale (qui n’est du reste pas toujours explicite et claire au niveau du politique) ; or, dans un cas comme celui-ci, l’aménagement traduit dans l’espace une conception politique qui porte notamment sur les questions de mobilité urbaine. Le résultat, c’est que les habitants ne débattent pas de la mobilité, c’est-à-dire des questions de fond, mais s’entre-déchirent sur les manières de réaliser les aménagements locaux, vus pour eux-mêmes : d’un côté, les automobilistes veulent des places de parcage devant chez eux et la possibilité de se déplacer le plus rapidement possible, d’un autre côté, d’autres habitants pensent à la sécurité de leurs enfants et des piétons ou à la convivialité que peut offrir une rue, alors que les commerçants ne réfléchissent qu’en termes de chiffre d’affaire. Ces points de vue sont irréconciliables à cette échelle, et la question doit relever d’un autre niveau politique.
Un autre a estimé qu’il fallait clarifier d’abord le concept de démocratie participative et ne pas le limiter à la démocratie locale. Dans une telle perspective, les habitants d’un quartier, dans une démarche de démocratie participative, doivent être à même d’empoigner un tel problème d’aménagement à condition évidemment de respecter deux principes fondamentaux qui ont été relevés lors de ces ateliers : le premier rappelle que l’enjeu principal de la démocratie participative à l’échelle d’un quartier, c’est de politiser le local, c’est-à-dire de l’inscrire dans une perspective politique plus globale. Et le deuxième : il ne peut pas y avoir de démarche de démocratie participative sans moyens ou outils pour arriver à problématiser collectivement les questions posées. Et c’est un des enjeux-clés de la démocratie participative. Si celle-ci n’est pas à même d’affronter ce défi, cela veut donc dire qu’on est obligé de déléguer à des spécialistes le pouvoir de faire des choix sur les questions politiques fondamentales.

Cet échange nous place au cœur du débat de ce soir : il n’y a pas de développement durable sans participation, proclame Action 21 de Rio. Cette participation doit se mettre en oeuvre partout où elle a du sens : dans l’entreprise, dans les écoles, dans les associations, mais aussi dans les lieux de vie comme le quartier. On pourrait alors être tenté d’adopter l’adage réducteur : « Penser global pour agir local ». Mais, comme nous l’avons vu dans ces deux premiers ateliers, la démocratie locale participative n’a de sens que si elle fonde ses débats sur des problèmes locaux qui font sens collectivement. Donc, la démocratie participative doit se donner les moyens de politiser le local, afin d’inscrire ces préoccupations locales dans une perspective plus globale, et, in fine, de pouvoir agir localement de manière cohérente. Notons que, ce faisant, on élargit l’adage à : « Penser le local en le liant à une pensée du global pour agir local ». C’est un premier point à débattre : est-ce bien ainsi qu’on entend la participation dans une perspective de développement durable ?

Mais l’expérience montre - et on pourrait prendre l’exemple emblématique de la poste à Saint-Jean - que l’adage n’est pas complet, même sous cette nouvelle forme : dans l’exemple de la poste, les participants se sont vite aperçus que la seule action locale n’aurait que peu de chance de succès et que la nécessité de penser le global pour trouver une démarche d’action locale appropriée conduisait aussi à la nécessité de devenir actif sur le plan global (le plan plus global étant, ici, limité au plan national). En effet, la fermeture du bureau de poste du quartier ne pouvait se comprendre que si on l’inscrivait dans la perspective de la mondialisation économique qui impose un rôle nouveau à l’Etat : pour faire bref, celui-ci doit se dépouiller de toutes ses activités qui pourraient être rentables, se recentrer sur des activités d’accueil d’entreprises et, pour se faire, diminuer drastiquement les charges fiscales. C’est donc une remise en question de cette option politique au niveau global qu’il faut aussi soutenir si l’on veut que l’action locale projetée ait un sens et une chance de réussite. En d’autres termes, il faut aussi agir global. Et l’on a vu les gens de Saint-Jean participer à des mouvements de la société civile sur le plan national contre le démantèlement des services publics.
Une deuxième question se pose alors à nous ce soir : l’exercice de la démocratie participative doit-il être compris comme la mise sur pied de démarches impliquant un « penser local, penser global, agir global, agir local » ? Et à quelles conditions cela est-il possible ?

Mais cela nous conduit à un lot de questions encore plus fondamentales :
 si le développement durable exige la participation, la participation peut-elle être circonscrite d’entrée de cause dans une perspective de développement durable ?
 Le développement durable n’est-il pas un projet politique qui, par essence, ne recueille pas l’unanimité et qui, dès lors, s’il est présenté comme le cadre dans lequel doit se développer la participation, va rejeter sur les marges de celle-ci les opposants à ce projet ?
 Dans un tel cas de figure, la démocratie participative n’est plus démocratique puisqu’elle exclut d’entrée de cause ceux qui ne sont pas d’accord avec son objet... N’est-ce pas ainsi qu’est ressenti actuellement le Forum de Saint-Jean par une partie de la population qui ne se retrouve pas dans les idées de modération de trafic par exemple et qui décide de boycotter les réunions ?

Voilà le cadre de discussion pour ce soir. Un tel cadre implique bien sûr que chacun d’entre nous précise bien sa conception du développement durable (un projet politique, et si oui lequel ?, ou une évidence qui fait l’unanimité ?) pour pouvoir établir ensuite les interactions avec la participation et l’exercice de la démocratie participative, notamment à l’échelle d’un quartier.

Pierre Varcher - avril 2007


Voici quelques liens sur les Ateliers de l’Avenir organisés par ECO 21 pour l’élaboration des Agendas 21 communaux

Agenda 21 Chêne-Bourg

Lancy

Bernex

Bureau ECO21 (Raphaëlle Juge, J-B Lachavanne, A. November, R. Merle)

Rapport de IDHEAP, Etat des lieux des démarches de développement durable
dans les communes, 2003
Cf Page 29-30 sur les méthodes de participation

Agenda 21 Ville de GE
Objectif N° 2 Information à la population et participation

Equiterre

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