La « verrue » des Franchises est en train d’être rasée

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  • par Paolo

 Aménagement

Situé dans le quartier populaire de Vieusseux, l’immeuble du 28, route des Franchises était au cœur d’une polémique, vieille de plus de vingt ans : d’un côté, ceux qui voulaient le sauvegarder ; de l’autre, ceux qui aspiraient à sa démolition. Ces derniers ont fini par avoir gain de cause : le bâtiment controversé est actuellement la proie des bulldozers.

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Cette fois, le point noir de la verrue des Franchises disparaît du paysage urbain | Image : Laurent Guiraud

Si tout se passe bien, un immeuble avec encadrement pour personnes âgées devrait lui succéder en 2020. « Il comportera environ 60 logements, note Jacques Cuttat, directeur de la Fondation des logements pour les personnes âgées ou isolées (FLPAI). Ce type d’édifice est indispensable. Nous croulons sous les demandes ! »

Précieux également : des logements coopératifs vont voir le jour en parallèle. Car l’immeuble voisin, sis 30-36, route des Franchises, propriété de la Société coopérative d’habitation Genève (SCHG), est lui aussi en phase de démolition-reconstruction. « Nous allons réaliser 83 logements, en lieu et place des 24 appartements existants, précise Jean-Pierre Chappuis, directeur de la promotion immobilière de la SCHG. Tous les anciens locataires ont été relogés. »

Et puis les promoteurs de ce renouveau se félicitent que leur projet « s’articule autour de la mobilité douce. Les voitures seront confinées sous terre. »

  550 nouveaux logements

« Ce fut une bien longue saga depuis la décision du Tribunal administratif d’autoriser la démolition du 28, route des Franchises, au début de 2009 », lâche Jacques Cuttat.
Pourquoi a-t-il fallu tant de temps ? « Bien des variantes ont été proposées depuis lors, l’objectif étant, de concert avec la Ville et l’État, d’avoir une vision d’ensemble du secteur Vieusseux-Villars-Franchises. » Suite à un concours d’architecture lancé en 2013, une cinquantaine de projets issus de divers pays européens ont été déposés. « C’est le jeune bureau genevois de Timothée Giorgis, qui prévoit de démolir et de reconstruire l’ensemble du périmètre, qui l’a emporté », précise le directeur de la FLPAI. Un plan localisé de quartier est en force, ajoute Jean-Pierre Chappuis : « Au total, sans compter l’immeuble de la FLPAI, nous ambitionnons de bâtir 550 nouveaux logements sur une surface de 10 hectares. »

On est bien loin des débats passionnés où les défenseurs du patrimoine ne tarissaient pas d’éloges sur le 28, route des Franchises et ses coursives, « dernier témoignage de l’architecture ouvrière des années 20-30 à Genève »… alors que ses détracteurs condamnaient cette « verrue », selon l’expression de Francis-Michel Meyrat, ancien directeur de la FLPAI.

Las d’une procédure « interminable », ce Jurassien au caractère bien trempé était allé jusqu’à murer le bâtiment ! L’État lui avait alors infligé une amende de 8000 francs. « Murer des appartements alors que certains sont encore occupés est inacceptable, estimait à l’époque Sylvie Bietenhader, ancienne directrice du Service de la police des constructions. Nous lui avions proposé de faire des contrats de confiance. »

Or un matin, il avait, dit-il, retrouvé douze squatters dans un logement de 17 mètres carrés, « tous toxicos ou illégaux ». Impossible, selon lui, de passer des contrats de confiance « avec des gens comme ça » ! Pour camoufler le béton, remplissant les fenêtres, Francis-Michel Meyrat avait sollicité l’artiste jurassien Stéphane Montavon, qui avait peint de très expressifs visages bleus et jaunes…

  Témoin historique

Cette folle saga s’achève donc alors que le 28, route des Franchises s’apprête à être rayé de la carte. Une page se tourne, concède Jacques Cuttat : « Ce bâtiment des années 30 représentait un vrai intérêt historique. C’était le dernier témoin de « cité vieillesse ». Mais nous ne sommes plus dans le contexte de la cité ouvrière de l’époque, initialement destinée à reloger des personnes âgées qui venaient des taudis de la ville. Il aurait été très difficile de rénover ce bâtiment à la structure fort légère, sans ascenseur et avec une seule salle d’eau par étage. »

(TDG) Créé : 03.07.2017, 18h34 Par Laurence Bézaguet